Pierre Gramegna : Luxembourg en perspective

Il faut parfois s'éloigner d'une œuvre d'art pour saisir son entière beauté. Ma carrière de diplomate à Paris, San Francisco et Tokyo m'a révélé le Luxembourg dans toute sa splendeur.

De près

Sur les bancs de l'école à Esch-sur-Alzette, j'ai découvert combien l'intégration pouvait être un exercice délicat pour les enfants. Petit-fils d'un immigré italien arrivé au Grand-Duché dans les années 20, j'héritais sans le demander du titre de médiateur. Les italiens reconnaissaient l'un des leurs en prononçant mon nom ; les luxembourgeois acceptaient leur compatriote, puisqu'en plus de la nationalité, je maîtrisais parfaitement la langue. Le moment le plus déchirant se répétait à l'heure de la récréation et du football. Devais-je intégrer l'équipe des joueurs partageant mes origines – dont le succès était quasi-assuré - ou plutôt rallier mes amis luxembourgeois ? Le plaisir de défendre les couleurs de son pays est toujours moindre lorsque la seule ambition se résume à perdre avec une différence de buts aussi réduite que possible.

De loin

En m'éloignant du pays, quelques années plus tard, j'ai réalisé à quel point le modèle luxembourgeois fonctionne à merveille. Vu de Paris, le pays paraissait certes petit, mais il affichait clairement tous les attributs d'un grand État : un dialogue social vivant, une démocratie effervescente et une tolérance marquée notamment par l'absence d'extrémisme à chaque élection.

En poste à San Francisco, faire simplement comprendre à un américain où se trouvait le Grand-Duché relevait du défi extraordinaire. Mais lorsque l'attention avait enfin été attirée, l'ignorance faisait systématiquement place à la fascination. Seul le Luxembourg est à la fois si bien placé et si ouvert sur l'étranger.

Ambassadeur au Japon enfin, je constatais que les aspects européens de notre culture sont considérés comme universels, mais le rapport au temps change. Les Américains focalisent sur le court terme, l'Europe sur le moyen terme alors que les Japonais réfléchissent en termes de générations.

De mon bureau

Je suis revenu au Luxembourg pour poursuivre ma contribution à la construction européenne. De mon bureau au Kirchberg à la Chambre de Commerce, j'observe le chantier permanent où les institutions de l'Europe, les banques, la Philharmonie, le Mudam et l'aéroport tout proche incarnent à mes yeux le Luxembourg du XXIème siècle. Un espace multiculturel et pluridisciplinaire ouvert sur le monde où l'harmonie règne malgré l'étonnante diversité.

À propos de Piere Gramegna

Né le 22 avril 1958 à Esch-sur-Alzette, Pierre Gramegna est de nationalité luxembourgeoise.

Directeur de la chambre de commerce du Grand-Duché de Luxembourg depuis 2003, Pierre Gramegna a notamment été Ambassadeur du Luxembourg au Japon, Consul Général à San Francisco et porte-parole de la Présidence de l'Union Européenne à la conférence sur le changement climatique de Kyoto, en 1997.